«  Initié en 2022, le partenariat entre Renault et Jean-Michel Jarre est étendu pour quatre années supplémentaires, jusqu’en 2028. » Voilà pour la communication officielle. Mais saviez-vous qu’une première association, ponctuelle, entre le losange et cet artiste, remonte à beaucoup plus longtemps ?

La Renault 14 est gravée dans l’imaginaire collectif de tous, passionnés d’automobile comme béotiens. Oui, c’est l’ambulance sur laquelle il est facile voire évident de tirer. Oui, elle restera à jamais comme « la poire », victime d’une campagne publicitaire « inspirée » mais maladroite. Oui, c’est un produit assez fade avec le recul (?), sans versions d’image marquantes. Oui, elle comportait sans doute trop d’éléments communs avec Peugeot pour emporter l’adhésion du Réseau Renault chargé de la vendre. Mais, oui, c’était aussi un produit qui pour diverses raisons aurait du sortir plus tôt et être apprécié autrement. Oui, ça reste aussi une Renault intelligente, une « voiture à vivre » avant l’heure. Et oui, pour ce qui nous intéresse, au-delà de la « poire », elle mérite aussi de rester en mémoire pour d’autres pubs, sommets de kitsch improbables.

Tout ayant déjà été écrit sur cette voiture, je me concentrerai sur mes « USP », la pub, les catalogues et la musique. Plus que la réhabiliter, ce qu’avec le temps elle ne demande plus si tant est qu’elle l’ait jamais demandé, je voudrais la ressusciter, enfin, surtout… lui rendre hommage. Un hommage à « la 7CV du bonheur » qui ne l’a jamais connu, le bonheur, la faute à une campagne publicitaire sortie de nulle part. En préparant ce billet j’ai d’ailleurs découvert quelques pépites que j’ignorais. Alors, place aux images et aux vidéos !

1977 : patatras, c’est là que tout bascule (encore plus). Sans doute déçus, au bout d’un an seulement, par des scores publicitaires et commerciaux qu’ils interprètent -à tort- comme trop timides, et attribuent -là encore à tort- à une Communication peut-être pas assez décalée, tous les cerveaux des équipes « strat pub » et « créa » de Publicis se réunissent un soir en mode « war room » pour « brainstormer ». Au menu notamment, l’omelette aux œufs de yack de Bernard (celui qui vient juste de se réincarner après sa quatorzième vie de chèvre), avec sa garniture de champignons (ramassés dans une vie antérieure, mais il ne sait plus bien laquelle) qui stimulent (?) les neurones ; le cake de l’espace confectionné par Christian, inspiré par son stage cuisine de 4 ans à Goa ; et un test des fumigations des plantes médicinales ramenées par Marie-Ange de sa retraite spirito-sensorielle-anti-système dans un ashram de Katmandou. Le résultat, validé par le Marketing de Renault faut-il le rappeler, va s’avérer d’abord « fructueux », puis très vite désastreux : c’est le concept de « la poire » qui figurera dans tous les bons cours de Marketing et Publicité comme l’archétype de ce qu’il ne faut surtout pas faire quand on on croit tenir le concept du siècle alors qu’on n’a pas encore entamé sa descente d’acid.

Bizarrement, le catalogue ne reflète pas ce délire créatif et reste étonnamment sobre.

On n’en a pas fini avec cette folie créative surtout à l’aube des démonstratives années 80. La poire « survitaminée » TS est l’occasion d’un nouvel opus TV en janvier 1980, tout aussi azimuté que les précédents, qui met en scène un conducteur qui devient commandant de bord l’espace d’un trajet en R14 où elle survole le Grand Canyon. C’est l’occasion d’introduire notre invité musical du jour : Jean-Michel Jarre qui, avec Equinoxe Part 5, signe la bande son de ce court-métrage de science-fiction digne d’une IA, d’autant plus kitsch et second degré qu’il est alors effectivement tourné et diffusé au 1er degré.

Toute cette débauche de jus de cerveau publicitaire sera plus contre productive qu’autre chose. Même si, au final, la R14 n’a pas été l’échec commercial que l’on voudrait retenir, elle n’a pas vraiment été aidée par ses campagnes de communication.

N’ayant pas la télé à l’époque, je ne me souviens que des spots radio qui reprenaient la même base musicale, et ce morceau reste très présent dans ma mémoire ; d’autant que Jean-Michel Jarre a été pour moi l’artiste fondateur, celui par lequel tout mon goût et ma culture pour la musique électronique a commencé. Parmi les albums d’anthologie « Oxygène » puis « Equinoxe », j’en profite pour remonter au Panthéon les 3 morceaux mythiques qui ont accompagné mes départs en vacances d’été à la fin des années 70, et influencé à tout jamais ma culture musicale… Des albums dans lesquels l’auteur avait lâché toute sa créativité, au point qu’il ne lui en restait plus une once au moment d’en trouver les noms de morceaux. Il se rattrapera dans les albums suivants !