UNE AUTO, UN MORCEAU : RENAULT FUEGO & MARCEL FOBERT & FOLIE CLUB

Qui aurait été la star du Rap Folie Club ? Marcel Fobert ou la Fuego ?… (image générée par IA) 

Après une première saison estivale de « Une auto, un morceau » qui a semblé vous plaire, j’ai eu envie de pérenniser et désaisonnaliser ce flashback dans les autos des années 80, et ce voyage dans mon double univers, automobile et musical. Pour ce redémarrage, j’ai choisi la Renault Fuego qui, avant d’être ringardisée, puis redécouverte et en voie de réhabilitation ces dernières années, était à sa sortie une proposition tout à fait moderne. Et même une de mes autos préférées à l’époque : je ne pouvais pas passer à côté dans cette rubrique !

Croyez-le ou non, je me souviens encore du lancement de la Fuego en 1980, alors que je n’avais pourtant que 9 ans (mais déjà passionné d’automobile !). Un objet à la fois moderne (esthétiquement tout au moins), efficace aérodynamiquement (une des premières en la matière, au meilleur niveau à sa sortie avec un Cx de 0,35), et tout à fait agréable à l’œil. Pas encore démodés par les GTI qui n’allaient pas tarder à pointer leurs liserés rouges, les coupés populaires (Ford Capri, Opel Manta, VW Scirocco, Toyota Celica…) étaient alors tout ce qu’il y a de plus tendance, surtout si l’on ne soulevait pas trop la jupe pour en découvrir les entrailles techniques. La Fuego ne faisait pas exception à cette dernière règle en étant basée sur la 18, qui dérivait elle-même de la beaucoup plus datée 12. Les motorisations au lancement n’avaient d’ailleurs rien de transcendant et il fallut attendre le dieu turbo pour donner un peu de caractère à tout ça, pour le meilleur (essence) comme pour le pire (diesel).

Couverture et première page du catalogue de lancement daté de l’année-modèle 1981. (collection personnelle)

Renault savait faire de belles selleries cuir dans ces années-là. (collection personnelle)

Innovation mise en avant avec le fameux essuie-glace « à pantographe ».
Pas de problème pour montrer des sièges « pétale » mais sans appui-tête en entrée de gamme. (collection personnelle)

Campagne de lancement : d’abord, imposer le nom, qui tranchait avec les appellations par chiffres alors en vigueur. (source : auto-pub.net)

… ce qui, en bon anglais, donne… (source : tbanjo.com)

Second volet de la campagne de lancement : essayer d’ancrer le positionnement performant du modèle,
quitte à tenter des effets spéciaux un peu naïfs. (source : auto-pub.net)

Déclinaison de ce que je suppose être le spot TV de lancement. Furieusement 80’s… (source : youtube.com/@80spowerleforum)

Chose relativement inhabituelle, Renault avait commandé un disque promotionnel pour accompagner le lancement à un artiste, Richard Lord, que l’on retrouve dans d’autres tentatives du même type,  surtout pour le losange et un peu (pour finir) pour Peugeot. Particulièrement inspiré (ou bien rémunéré) semble t’il, il va carrément faire deux opus, soit, par la magie des faces B, quatre morceaux ! Attention, chefs d’œuvre en approche…

On commence par « Fuego reggae », une improbable version semi-instrumentale dont le texte est bien pauvre.
(source : youtube.com/@ContainYrBrain)

En face B, « Mon nom est Fuego ». Ici, l’exercice principal consiste à enchaîner les rimes pauvres en « o ».
(source : youtube.com/@odilederey)

Comme on ne change pas une formule qui « gagne », Richard Lord remet le couvert avec « Fuego rock », qui reprend l’esprit
du morceau précédent mais en plus dynamique et avec un texte un peu « épuré ». (source : youtube.com/@djtazio2577)

Puisque décidément rien ne vous -nous- sera épargné, une version anglaise tendance crooner à accent français sera même commise,
« With my Fuego, I feel fine ». Pour un public anglophone ou juste parce que ça faisait bien ? (source : youtube.com/@TVJUKEBOX2)

L’année-modèle 1982 amène peu de nouveautés, si ce n’est l’option « Normalur », qui était non seulement un régulateur de vitesse,
mais aussi un limiteur, avec plus de 30 ans d’avance. (collection personnelle)

En 1982 le rouge est mis… (collection personnelle)

… histoire de coller à la campagne de pub « piment rouge ». (source : ebay.fr)

Une rare version découvrable avec toit toile, assez inhabituelle sur un coupé. (collection personnelle)

Rare, donc, et pourtant publicisée ! (source : lescopainsd-abord.over-blog.com)

Un écorché technique typique des années 80. (collection personnelle)

Comme, en 1982, les Renault F1 commencent enfin à voir le drapeau à damiers, c’est tentant de les utiliser
pour promouvoir un coupé en mal d’image. (source : youtube.com/@robatsea2009)

Couverture et première page du catalogue 1983. (collection personnelle)

L’événement du millésime est donc l’introduction du turbo diesel, dont l’encombrement moteur imposera un bossage de capot,
peint en noir uniquement cette année-là. (collection personnelle)

Même si je semble un peu caustique, voire critique, par rapport à cette motorisation « à huile lourde », il faut lui rendre justice. Au moins celle d’avoir osé, d’avoir cru en cette association alors saugrenue, pour devenir le premier coupé turbo diesel vendu en Europe. On en reparlera plus tard, en regardant, au hasard, le « mix énergie » des ventes de Coupé 406 ou 407… Dans l’immédiat, cette proposition inédite ne recueillera, ni un avis très positif de la Presse spécialisée, ni un plébiscite commercial propre à infléchir la courbe de ventes.

Une pub à la hauteur de l’originalité du produit… (source : ebay.fr)

La version Turbo essence, bien que nettement plus désirable (et désirée de nos jours), ne connut pas, ni accueil, ni impact, plus favorable. La courbe de vie de la Fuego s’était déjà écrasée puis aplatie depuis trop longtemps.

1984 : la Turbo en vedette ! Écrit en gros sur les côtés et sur la lunette AR : il fallait que ça se sache…
Notez aussi les jantes « nid d’abeille » caractéristiques de la personnalisation esthétique de ces années-là. (collection personnelle)

Ce qui faisait donc deux motorisations turbocompressées dans la gamme,
une transposition directe de la technologie éprouvée (d’abord dans la douleur) en F1. (collection personnelle)

1984 voit aussi arriver une nouvelle planche de bord plus moderne. Au fil des pages on apprend pour la finition TL d’entrée de gamme que
« la simplicité passe souvent par la sophistication. ». Ah bon… (collection personnelle)

Ce garnissage velours à rayures rouges spécifique à la Turbo Essence sera aussi utilisé sur les 9 et 11 Turbo et l’Alpine A310 V6.
(collection personnelle)

Il faut donc désormais mettre le turbo en avant, et l’analogie avec la F1 coule de source.
Par contre, le pauvre effet spécial censé imager la trainée/poussée est touchant de naïveté… (source : youtube.com/@ewjxn)

L’image de la Fuego va hélas rapidement se dégrader, notamment sous l’effet de la déferlante GTI. Néanmoins, cette voiture se retrouvera pendant quelques années sur le parking des discothèques de province, ce qui m’a inspiré directement le choix du morceau associé, sorti en 1984, plus ou moins en même temps que la Turbo, donc.

J’aimais beaucoup ce titre de Marcel Fobert & Folie Club, aux sonorités synthétiques et magnifiant avant l’heure (de la techno) le DJ auquel je m’identifiais volontiers. En plus d’une inspiration de Chagrin d’amour Chacun fait (c’qui lui plaît), précurseur du rap français, j’ai aussi découvert en préparant ce billet qu’il était assimilé à l’italo-disco, ce qui est rarissime pour un morceau français, et je comprends alors mieux mon attirance. Il faut dire que les trois co-signataires producteurs de ce disque, Luca Orioli, Enzo Vallicelli, et Stefano Scalera ont tous été impliqués dans divers projets de ce courant musical (dont Silver Pozzoli, le plus connu)…

Morceau qui a correctement marché notamment en hits des clubs et sur les pistes, mais en mode one-shot : on ne ré-entendra plus parler de Marcel Fobert par la suite. Tout comme on n’a plus guère entendu parler de la Fuego pendant longtemps…

Un voyage immersif dans le quotidien d’un DJ des années 80 (je fais allusion aux paroles, hein…). Pour moi très aspirationnel !
Et un clip déclicieusement daté… (source : youtube.com/@generationhitmusictube9601
)

… enfin… sous nos latitudes. Parce que pendant ce temps-là, la Fuego est devenue culte très loin de chez nous, en Argentine. Elle aura même la chance de s’offir un restyling qu’elle n’aura jamais eu en Europe ! Et des engagements en compétition, là aussi inédits…

Un panorama complet de l’évolution de l’espèce… (source : noticias.autocosmos.com.ar)

… et la voici, tout « fuego », tout flamme… (source : youtube.com/)

Share This